Niépce correspondance et papiers
N IEPCE 757 mais elle faite par un graveur qui sent toute la difficulté qu’il éprouve en exécutant 1 . Vous voyez que je ne vous ménage pas, je vous offre franchement les avis que vous me demandez, d’ailleurs votre découverte a d’autres côtés assez beaux pour se passer de cet avantage, et l’on pourrait retoucher au burin les parties défectueuses, ceque l’on est obligé de faire à toutes les gravures à l’eau forte. L’un de vos portraits s’il était gravé sur cuivre comme il l’est sur étain et qu’on le retouchât pourrait faire une gravure passable, mais il y aurait beaucoup à travailler. J’attends beaucoup de vos essais d’après nature, cette découverte m’a semblé extraor- dinaire et d’abord incompréhensible, cependant j’ai la certitude que vous réussirez, en pen- sant à vos essais de gravure et alors à la possibilité de fixer les rayons de la chambre noire. Je souhaite de tout mon cœur que votre tentative soit couronnée d’un plein succès, car c’est une découverte qui doit être dans les arts d’une grande utilité et qui fera peut-être autant de sensation que la lithographie en a faite à son apparition, cependant je crains que votre gravure n’atteigne pas à la perfection désirable, je souhaite me tromper, je vous offre le secours de mon burin, s’il devenait nécessaire. Je vous remercie avec reconnaissance de la proposition que vous me faites de m’associer aux avantages qui pourraient résulter de votre découverte ; si je vous suis utile je vous laisse la liberté d’agir comme vous voudrez. Vous me demandez si je connais Monsieur Daguerre ? Il y a plusieurs années que sans le connaître particulièrement j’allai dans des soirées où je le rencontrai. Au printems der- nier ayant été chargé par un éditeur de graver un de ses tableaux qui est dans la gallerie du Luxembourg, j’allai lui montrer le dessin que je fis d’après ; voila comment je fis sa connais- sance je ne l’ai vu depuis qu’en allant voir un de ses tableaux au Diorama, et je dois lui soumettre à la fin du mois une épreuve de ma gravure qui est presque achevée 2 . Quand à l’opinion que j’ai de lui, M. Daguerre comme peintre a un grand talent d’imi- tation et un gout exquis pour les // ajustemens de ses tableaux, je lui crois une intelligen- ce rare pour ce qui a rapport aux machines et aux effets de la lumière ; l’amateur en visi- tant son établissement peut s’en convaincre facilement 3 . Je sais qu’il s’occupe depuis long- tems du perfectionnement de la chambre noire sans néanmoins avoir connu (que par vous et M r . le C te de Mandelot à qui vous en avez parlé) le but de son travail. Je vous approuve de rompre avec lui Il faut quelquefois peu de chose pour mettre sur la trace d’une décou- verte de laquelle on ne se doutait pas. Je vous prie de compter sur ma discrétion et d’agréer l’assurance de mes sentimens distingués V.... L e Je vous enverrai vos planches lorsque vous les désirerez, et la planche gravée que je mets à votre disposition quand vous en aurez besoin. 1. Lorsqu’il effectuera des tirages sur papier à partir de ces plaques, Lemaître constatera de meilleurs résultats que ceux qu’il envisageait (v. 413). 2. La chapelle des Feuillants. Cette gravure sera exposée au salon de 1827, sous le n° 1271. Intérieur d’une cha- pelle de l’église des Feuillants, le tableau de Daguerre, l’avait été à celui de 1814 (G.P.2 p. 90). Une photogra- phie de la gravure de Lemaître a été publiée par Gernsheim (H.&A.G. pl. 6). 3. Nous ne citerons qu’un témoignage, peu suspect de complaisance à l’égard de Daguerre : celui de Nicéphore lui-même. « Je n’ai rien vu ici, qui m’ait plus frappé, qui m’ait fait plus plaisir que le Diorama », écrira-t-il lors de son passage à Paris, quelque six mois plus tard. Ayant contemplé un tableau peint par Bouton, il précisera : « C’est bien à coup sûr quelque chose d’admirable et qui produit l’illusion la plus com- plette ; mais rien n’est au dessus de deux vues peintes par M r . Daguerre [...] » (v. 427). 409 1824 1829
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