Niépce correspondance et papiers

758 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS 410 Copie de lettre 1 (A.S.R.) 2 Chalon-sur-Saône, 16 février 1827. Nicéphore à Lemaître. Monsieur Lemaitre, graveur Rue Mazarine n°. 32, à Paris Châlon-sur-Saône, le 16 février 1827 Monsieur, J’ai reçu votre lettre 3 en réponse à la mienne qui vous annonçait l’envoi des planches 4 . Je suis surpris et peiné de voir qu’on vous a fait subir un droit de 35 c mes ., puisque le port de ces planches avait été affranchi à raison de 2 f. 8 sous. Comme il n’est ni juste ni conve- nable que vous supportiez cet excédant de dépense, je m’arrangerai de manière que vous en soyez remboursé. Je suis bien aise, Monsieur, d’avoir provoqué toute la franchise et la sévérité de votre critique dans l’examen de mes faibles essais : je vous en remercie sincèrement, et il ne me reste plus qu’à en profiter, si la tâche n’est pas au dessus de mes forces. Vous voyez que je ne me décourage point, mais que je ne me fais pas illusion. Je ne sens que trop effective- ment, quelle serait la témérité de l’entreprise comparée à l’insuffisance de mes moyens. Si pour réussir, il me fallait employer les ressources d’un art dont vous connaissez, Monsieur, toutes les finesses, et qui, malgré cela, vous présente tant de difficultés, toute mon ambi- tion se bornerait donc à pouvoir constater par des résultats positifs, la possibilité d’un suc- cès satisfaisant dans les différentes applications de ma découverte. Les observations que vous m’adressez sont bien fondées et parfaitement justes. En effet, j’ai toujours remarqué moi-même, dans mes essais de gravure sur pierre, sur cuivre et sur étain, ce sablé et cette rondeur des tailles que vous signalez. Le sablé est bien certainement produit par la fragili- té ou la perméabilité du vernis appliqué en couche trop mince 5 ; mais, quand à cequi concerne l’arrondissement et la confusion des tailles dans la partie des ombres, je ne puis, Monsieur, en expliquer la cause qu’en l’attribuant à la divergeance du rayon lumineux, et à la résistance plus ou moins grande qu’ils éprouvent dans leur transmission, inconvenient qui, autant que je puis croire, n’existerait plus s’il m’était possible de remplacer par l’em- ploi du mégascope, les procédés dont je me sers pour la copie des gravures 6 . Vous allez sans doute m’objecter qu’en admettant les suppositions les plus favorables, vous ne concevez pas comment je pourrai me passer des secours de l’art. Là dessus, Monsieur, je vous prie- rai de considérer que dans ce cas, le résultat de l’opération principale, serait tel, qu’alors l’office de la main, se réduirait à verser l’acide sur la planche qui se trouverait attaquée et creusée dans le rapport // de la dégradation des teintes : car s’il en était autrement, je devrais à plus forte raison, désespérer de fixer l’image des objets représentés dans la chambre noire ; cette image qu’on peut regarder comme le beau idéal du lavis*, étant toute 1824 1829 Des débuts de la photographie jusqu’à l’association avec Daguerre 1. De la main d’Isidore. 2. Publ. in U (doc. 43) ; antérieurement in L. 1851 n° 4 p. 16. 3. V. 409. 4. V. 406. 5. De ce fait l’acide arrive à pénétrer légèrement au travers du vernis. La plaque d’étain est alors piquetée d’une multitude de points minuscules. 6. L’inventeur envisage de reproduire les dessins non plus par contact mais en les « photographiant » au moyen du mégascope, appareil optique qui sert à projeter l’image d’objets de petites dimensions, un des- sin dans le cas présent.

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