Niépce correspondance et papiers

800 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS 438 Lettre (Coll. J.N.) 1 Kew, 21 novembre 1827. Nicéphore à Eugénie et Isidore. .Kew, le 21 novembre 1827. Nos peines deviennent plus supportables, ma chère Génie, lorsqu’elles sont partagées : vous nous le faites éprouver d’une maniere bien persuasive et bien douce, par le tendre intérèt que vous et votre cher mari, nous avez témoigné depuis notre fatale arrivée à Londres, et surtout par la touchante expression de vos sentimens à cet égard-là. Ma femme, à qui vous les adressez, me prie de vous témoigner combien elle y est sensible, combien elle en est reconnaissante. Quoique nous ayons commencé un peu tard l’apprentissage du mal- heur, nous sommes accoutumés à souffrir, et nos plus grands chagrins ne sont pas ceux que nous ressentons personnellement ; soyez en bien persuadée. Mon pauvre frère est toujours à peu près dans le même état : il y a près d’un mois qu’il s’est mis au lit, et qu’il ne l’a quit- té. Nous ne pouvons rien savoir ni rien dire de plus sur sa maladie, car il refuse nos ser- vices, ceux de la véritable amitié, et parait mettre toute sa confiance dans une petite domes- tique qui n’entend pas plus le français que les maîtres de la maison 2 . Ces disparates* dans le caractere et les affections de mon frère, sont une des choses qui pouvaient nous affecter le plus ; aussi en sommes nous profondément affligés. Nos hôtes ne sont pas mieux traités que nous, et que deviendrait le malheureux malade, s’il lui fallait chercher ailleurs un asyle ? C’est alors que nous nous trouverions dans un extrême embarras... Mais, ne nous arrêtons pas à une pareille idée : nos peines sont trop réelles pour les aggraver encore par de tristes pressentimens. Ceque nous avons de mieux à faire, ma chère Génie, c’est de nous résigner, de ne point nous décourager, et de trouver dans l’instabilité même des choses humaines, un nouveau motif de consolation. J’emploîrai de mon côté, tous les // moyens qui pourront dépendre de moi, pour compenser les pertes que nous avons essuyées, et je ne désespère point d’y parvenir. Embrassez tendrement pour nous, vos chers et bons parens. Témoignez à M r . de Champmartin, notre regrèt de le savoir encore malade, et celui que je ressens de ne lui avoir point donné directement de nos nouvelles, mais, lorsque nous en aurons de bien décidément satisfaisantes à annoncer, je me ferai un véritable plaisir de les lui adresser de premiere main. Ne nous oubliez pas, je vous prie, auprès de nos parents, amis et voisins. Mille baisers à votre aimable enfant, et recevez, ma chère Génie, l’assu- rance toute particuliere de notre tendre et inaltérable affection. Ma femme veut joindre sa signature à la mienne, pour constater sa solidarité sous un aussi agréable rapport. .Ag s . Niépce. ://: N. Niépce .Nous avons lu avec bien de l’intérêt, mon cher Isidore, les détails que tu nous donnes sur nos affaires. L’activité, le zèle et l’intelligence avec les quels tu t’en occupes, nous font le plus grand plaisir. Nous ne pouvons que bien augurer de leur résultat, et te renouveller à ce sujet, le témoignage de notre vive satisfaction. Il est très-heureux que l’on nous ait pro- 1824 1829 Des débuts de la photographie jusqu’à l’association avec Daguerre 1. Une copie de la main d’Isidore conservée en Russie, a été publiée in U (doc. 57). La comparaison entre l’ori- ginal que nous publions ici et cette copie, fait apparaître une multitude de petites différences (ponctuation, orthographe, inversions), globalement sans incidence sur la compréhension du texte. 2. Monsieur et Madame Cussell. « Nos hôtes ne sont pas mieux traités que nous », précise Nicéphore plus loin.

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